✍🏻Cher Serey,
Ça y est, ça fait 24 h que nous sommes en mer, et comment te décrire toutes les émotions qui se déversent ?
Le départ d’abord. Quel moment unique. Nos amis, nos familles, nos sponsors, tous réunis ans la joie pour encourager ce projet fou dans lequel nous avons eu la bêtise de nous lancer.
Ensuite, quelques heures de joie pure. Cette joie du moment présent, inaltérable, que même 5 litres d’essence renversés dans l’habitacle ne sauraient ébranler. Une joie d’être enfin en mer, sublimée par des percées de dauphins à travers un phytoplancton plus lumineux que jamais. Quand l’océan souhaite la bienvenue, il ne le fait jamais à moitié.
Mais un instant est beau car il est éphémère. Aussitôt le premier quart traversé, j’ai la mauvaise idée d’aller passer quelques minutes sur la cartographie. Dehors, un bon 20 nœuds, au travers. Les vagues ne sont pas énormes mais très déconstruites, car le vent tourne beaucoup depuis quelques jours. Et puis à l’intérieur, une bonne vielle odeur de station essence. Assez rapidement, c’est la descente aux enfers. Mal de cœur, impossible de manger, froid, impossible de dormir. Et ça rumine. Dire qu’on s’est endetté de 10 000 € pour se retrouver dans ce calvaire…
Bon. On n’a pas été très bon sur le départ, il s’agirait de passer la seconde. L’angle est limite, mais on hisse un spi, notre petit asymétrique. On ne peut pas le garder longtemps, mais ce petit bord nous permet de recoller quelques concurrents. C’est déjà ça… Maintenant, c’est tout droit, entre le près et le travers. On régule au mieux, mais on n’a pas grand-chose à faire de plus pour accélérer… Frustrant de voir les copains avec des bateaux qui marchent bien sur cette allure décrocher les milles sans trop pouvoir rattraper.
Maintenant, l’enjeu crucial est d’arriver à dormir. Le mal de cœur s’estompe petit à petit, et cette prochaine nuit va être essentielle, car la suivante sera marquée d’un gros coup de vent, donc peu de sommeil en perspective.
Ma lettre paraît assez négative, mais le moral reste pas trop mal. C’est l’ascenseur émotionnel, un coup, la joie, un coup, la lassitude et le questionnement face au chemin qu’il reste à parcourir. Ça va être une course au mental, et c’est aussi pour ça qu’on a signé !
À très vite,
Ton parrain, Vianney ⛵️
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